MARGUERITE DE VALOIS, dite la reine Margot

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Les ami/es de Marguerite

Siméon-Guillaume de La Roque

Les Œuvres de S.G. de L. R… A la Royne Marguerite. Paris, Vve Claude de Monstr’œil, 1609.

À la Reine Marguerite.

Madame,
Entre les plus précieux dons qui peuvent décorer les beaux esprits dont la France maintenant est remplie par une libérale influence céleste, la Poésie sera toujours en très grande estime, non seulement en ce fleurissant Empire, mais par toutes les nations du monde qui peuvent ressentir quelque pointe d’humanité et de civile éducation, si bien que cette science se doit dignement appeler Maîtresse de la vie, fleur de l’éloquence, lumière de la doctrine, doux aliment de l’âme, et trompe de la Renommée des Dieux et des hommes mêmes, alors qu’elle est avecsa naturelle disposition jointe avec l’art qui l’embellit; de sorte qu’elle apporte de la gloire au Poète, et du contentement au lecteur. Ce que je n’ai acquis pour n’avoir étudié qu’en la conversation des doctes, comme en la nourriture que j’ai prise chez un Prince rempli de savoir, de grâce et de mérite, qui jadis eut l’honneur de vous appartenir du côté du père et de celui de la vertu, qui durant ma plus grande jeunesse m’a fait connaître la maison des Rois vos prédécesseurs, où tout ainsi qu’Ulysse qui, n’eut que le monde pour livre, je n’ai eu que cette Royale Cour pour école, à qui je dois les fruits de mon apprentissage, et les prémices de cette œuvre que j’ai faite de divers sujets. Comme les diverses conceptions s’offrent à l’imagination, et n’ayant dédié le premier livre à personne, j’étais demeuré comme celui qui diffère le baptême de son enfant, jusqu’à lors qu’il ait fait élection d’un Parrain dont il puisse recevoir de l’honneur et du support. Ainsi, par un heureux destin, j’ai dévotement attendu le retour de votre Majesté, afin que sous le nom de la plus grande Reine du monde, et sous l’ombre des Couronnes des lys et des lauriers qui vous ceignent le chef, il se puisse mettre à l’abri de l’orage de la censure, avec la liberté d’aller partout comme la biche du Romain Auguste; reconnaissant combien de périls court celui qui se présente au jugement universel. C’est pourquoi Madame, je supplie très humblement votre Majesté d’assister ces vers en leur voyage de votre favorable secours, comme fit l’amoureux et pitoyable Démon qui délivra la dolente Psyché des peines où Vénus l’avait condamnée; et que sur le front de ce petit volume, l’on voie reluire votre belle et divine image, et les Muses à vos pieds, priant Dieu qu’il rende la Royale trame de votre vie d’égale force aux racines des lys sacrés dont vous êtes sortie.
Votre très humble et très obéissant serviteur,
La Roque.

Texte établi par Sophie Cinquin, avec la collaboration d'Éliane Viennot (orthographe et ponctuation modernisées; majuscules respectées sauf cas introduisant des confusions).

mis en ligne le 8.1.2012


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