MARGUERITE DE VALOIS, dite la reine Margot

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Les ami/es de Marguerite

Denis Féret

Les Primices dites Le vray françois, ou Poëmes, advis, et mémoires... Par Denis Feret avocat. S.l.s.n., 1614.

[Arsenal 8-BL-10881]

Contient :

- L’Y grec Martel d’Heresie. En sonets magrigals, avec sa version en vers elegiaques latins. Devoüe à la Royne Marguerite. Par D.F., Advocat à Moret […]. Plus une ode paraphrasique sur l’Apocalip. et Saincte escriture […] et sa version Latine en vers saphics

- Les Amours conjugales en Dieu. Qui sont dix sonets Acrostiches et Anagrammes devouëz à la Reyne Marguerite.

À LA REINE MARGUERITE.

Madame,
Votre Majesté ne se doit tant prendre à moi qu’au sieur de Collomby, commentateur de Tacite*, de ce que je vous mets en lumière, en suite de mon Poème du L’y grec Martel d’Hérésie, et son Ode Paraphrasique sur l’Apocalypse et saint écrit, ce petit opuscule que j’ai nommé Amour conjugal en Dieu. Car, lui et moi nous étant trouvés chez même imprimeur, où il fait imprimer son Tacite (qui sera, au peu [selon le peu] que – comme en passant – j’en ai pu apprendre, toute autre chose, c’est-à-dire beaucoup mieux et plus parfaitement que ce qu’il en a jà mis en lumière), étant par lui requis, ou comme sommé de chanter dès à présent quelque chose d’amour telle que je voudrais prendre pour mon sujet (et me conseillait, disait-il, de ce faire, pour donner plus de grâce à ma Muse et contenter l’humeur des diverses personnes par les mains de qui mon œuvre a à passer), je me suis laissé vaincre à ses raisons et sommations; et tant que j’en ai fait ce qu’en voyez, qu’il plaira à votre Majesté recevoir en gré, quoique chose indigne d’icelle, sinon au moyen de sa bonté qui l’en rendra digne, l’acceptant aussi bien comme moi-même et ma femme et mes enfants, tous faits et rendus vôtres et à vous servir en tout ce qu’il plaira à votre Majesté. À laquelle je supplie ne m’en imputer à crime (non plus qu’on ne le fait point aux autres Poètes, parlant de leurs maîtresses) si j’ai dit davantage de bien de ma dite femme qu’elle n’y en trouvera quand elle [Sa majesté] la fera venir, pour lui réciter [pour qu’elle lui lise] ses Songes et à telles autres fins qu’elle verra bon être. Ce qu’attendant, je prierai et prie Dieu, Madame, qu’il vous maintienne en toute prospérité et santé.
C’est le plus que [souhaite le] bien affectionné et humble serviteur de votre MAJESTE, Denis Feret.
À Paris, en novembre 1614.

* Observations politiques, topographiques et historiques sur Tacite… par François de Cauvigny, sieur de Collomby, 1613

[…]

Ode Paraphrasique sur l’Apocalypse et sainte écriture, par quadrins fut le chant, en quel désert. Et sa version latine en vers saphiques. Avec l’Hymne particulière et sa version du feu Roi Henri le Grand. Le tout dédié à la Reine Marguerite. Par Denys Feret, Avocat à Moret près [de] Fontainebleau.

À la Reine Marguerite.

Madame,
Votre Majesté prendra en bonne part, s’il lui plaît, cette présente édition de cette Ode Paraphrasique, laquelle j’ai pensé être à propos d’être dès à présent mise au jour. Considérez (entre autres choses) ma résolution de vous bailler aussi dès à présent l’Opuscule appelé les Amours Conjugales en Dieu en suite de cette dite Ode. Et dont [d’où], Madame, le don que je vous en fais, est principalement pour et au nom de ma femme, afin que je ne lui fasse tort touchant son Songe instructif de se présenter à votre Majesté par icelle [ode], pour l’obtention des choses qu’elle en espère dès longtemps, selon qu’étant mandée par votre Majesté, pour l’ouïr sur ledit Songe et autres siens Songes, et pour vous rendre bon et fidèle service, elle vous en pourra dire davantage. Or, Madame, ces choses étant par moi délaissées, comme si elles devaient passer ainsi que de purs Songes humains et choses de fumée, je me juge pourtant être obligé de finir par une plus belle et relevée fin, et qui serve au fait et explication de cette dite Ode Paraphrasique, au peu [pour le peu] que pour le présent je trouve être à propos d’en dire, sauf à recouvrer par moi au surplus quand le cas y écherra, et qu’il me sera donné de Dieu de ce faire. Je dis donc, Madame, que les sept sceaux du Livre ouvert par l’Agneau sont les sept Âges ou parts inégales du temps, depuis la Nativité de notre Seigneur Jésus-Christ jusques au futur jugement général des hommes. Et dont le premier desdits sept Âges est fini à Constantin le Grand, le second à Frédéric Barberousse, le tiers au feu Roi dernier Henri le grand, et le quatrième finira sous l’Antéchrist. Et ainsi les autres suivants, desquels m’est force de me taire pour ne m’être donné de rien dire.
Combien que ce que dessus est dit, et que j’en ai dit en ladite Ode et ailleurs (sur le fait d’iceux chevaux et Chevaliers [cavaliers], et cri du sixième [livre] de l’Apocalypse ou voix disant […]: «Et tu ne blesseras et gâteras le vin et l’huile») ne soit étalable et soutenable par moi que pour opinion, pour ne pouvoir assurer que ce me soit chose inspirée, combien que je la pense être plutôt pour chose inspirée de Dieu que chose acquise. Et tant que j’espère en sa miséricorde qu’il nous redonnera à [son] retour fait de Justice très ample, quoique l’Antéchrist et les Hérétiques de son temps la corrompront en excès Pytagorique et indistincte prohibition des mariages à tous qui voudront être sauvés. Et ainsi de même, d’une perpétuelle jussion d’abstinence des chairs, selon ce que Saint Paul en a prophétisé. Et de là en arrivera la recrue de malices des hommes, encore plus grande qu’à présent.
Incertain pourtant que je suis de ce qui arrivera des choses que je propose, c’est là, Madame, tout ce que je juge vous en devoir dire pour le présent. Excepté qu’Onias et Septante, deux Interprètes, me sont [sont selon moi] pour la fin du sixième Âge ou part du temps d’auparavant la Nativité de notre Seigneur Jésus Christ ; et Hérode, prophétisé Roi des Juifs par le patriarche Jacob, m’est [est selon moi] le septième Âge et fin d’icelui. Auquel notre Seigneur n’a manqué de venir, non plus qu’il ne manquera aussi à son avènement en gloire future, ni les prophéties (tant de l’Apocalypse qu’autres) à s’accomplir. Ce qu’attendant je prierai et prie Dieu, Madame, ainsi que ma femme et enfants en font et feront de même, pour votre prospérité et santé.
C’est à Paris, en octobre 1614,
le plus humble et affectionné serviteur de votre Majesté.

Texte établi par Sophie Cinquin, avec la collaboration d'Éliane Viennot (orthographe et ponctuation modernisées; majuscules respectées sauf cas introduisant des confusions).

mis en ligne le 15.5.2018


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